L’Islam et le racisme
Le nègre représente l’homme naturel dans toute sa barbarie et son absence de discipline. Pour le comprendre, nous devons abandonner toutes nos façons de voir européennes. Nous ne devons penser ni à un Dieu personnel ni à une loi morale ; nous devons faire abstraction de tout esprit de respect et de moralité, de tout ce qui s’appelle sentiment, si nous voulons saisir sa nature… on ne peut rien trouver dans son caractère qui s’accorde à l’humain.” George W. F. Hegel : La raison dans l’histoire. Introduction à la philosophie de l’histoire, Paris, Éd.10/18, 1965, p. 234 et 251.
Que les Prières et les Salutations d’Allah soient sur notre Prophète Mohammed ainsi que sur sa famille et tous ses Compagnons !
La Législation musulmane prône l’égalité entre ses adeptes dans la plupart des domaines. Il ne sert à rien de mettre en avant sa lignée pour la personne qui n’est pas pieuse, car le critère de distinction entre les hommes est basé sur la piété comme le formule le verset suivant : (Ô vous les hommes ! Nous vous avons créé à partir d’un mâle et d’une femelle. Nous vous avons partagé en peuples et en tribus afin que vous vous connaissiez. Le plus honorable d’entre vous auprès d’Allah, c’est le plus pieux ).[1] Abû Dhar (t) relate qu’il dénigra la mère d’un homme lors d’un échange de propos. Vexé, l’homme alla se plaindre au Prophète (r) et lorsque ce dernier eut l’occasion de rencontrer le coupable, il le blâma en ces termes : « Abû Dhar ! Tu es un homme qui a un comportement de l’ère païenne. »[2] Certaines versions précisent que l’homme en question était Bilâl l’abyssin et qu’Abû Dhar lui lança : « Hé fils d’une Noire ! »[3] Dans un autre Hadith, le Prophète (r) soutint à Abû Dhar : « Sache qu’un blanc ne peut être mieux qu’un noir si ce n’est par la piété. » [4] Il faut savoir que Bilal (t), le Muezzin du Prophète (r) fut un esclave affranchi par Abû Bakr. Pourtant, ‘Omar le deuxième Khalife se plaisait à dire : « Abû Bakr notre maître a affranchi Bilâl notre maître. »[5] Certaines annales rapportent également que le Prophète (r) maria Bilâl a une fille des Banû Bukaïr.[6]
Selon Abû Nadhra, le Messager d’Allah (r) déclara lors du sermon au cours du Pèlerinage d’Adieu à Mina (pendant les trois derniers jours du pèlerinage) : « Ô gens ! Vous avez un seul Dieu et vous venez d’un seul père ! Il n’y a pas de différence entre un arabe et un non arabe ni entre un blanc et un noir si ce n’est par la piété. »[7] Selon Abû Huraïra (t), le Messager d’Allah (r) a dit : « Allah vous a abrogé la fierté de l’ère païenne et l’honneur des ancêtres. Il existe désormais deux catégories d’hommes : un croyant pieux et un pervers malheureux. Vous êtes les fils d’Adam et Adam est de terre. »[8] Toujours selon Abû Huraïra, on demanda au Messager d’Allah : « Quel est le plus honorable des hommes ?
- Le plus pieux d’entre eux répondit-il.
- Ce n’est pas sur cela que nous t’interrogeons.
- C’est Yûsouf, qui est un prophète d’Allah, fils d’un prophète d’Allah, qui lui-même est le fils d’un prophète d’Allah.
- Ce n’est pas sur cela que nous t’interrogeons.
- Vous m’interrogez alors sur les minerais arabes ? [Les hommes sont comme les minerais d’or et d’argent,] les meilleurs d’entre vous à l’époque païenne sont les meilleurs d’entre vous dans l’Islam s’ils comprennent leur religion. »[9]
Le Hadith précédent nous informe qu’il existe une hiérarchie entre les hommes. Dans un autre Propos prophétique, Allah nous apprend qu’il élit certains hommes selon une sagesse infinie qu’Il est le Seul à pénétrer.[10] C’est pourquoi, les Arabes dont le sceau des Prophètes est issu, étaient prédisposés à recevoir le dernier message envoyé à l’humanité, bien que cette particularité ne leur offre aucune prérogative en dehors de celles que nous allons évoquer.[11] Or, il incombe ici de développer cette question plus en détail. Nous disons donc :
• Selon le Hadith, quiconque n’est pas empressé à faire des bonnes œuvres ne doit pas mettre en avant sa lignée.[12] C’est pourquoi Allah ne fait jamais les éloges d’une personne en fonction de sa lignée ou de son affiliation à un prophète. Néanmoins, les hommes se distinguent dans le Coran par leur foi et leurs bonnes œuvres.[13]
• L’Islam interdit formellement de se vanter de sa lignée même si celle-ci est effectivement plus noble qu’une autre. En outre, il préconise la modestie.[14]
• Il incombe aux musulmans d’être comme un seul corps et de ne pas se laisser affaiblir par les divisions qui sont le propre du paganisme.[15]
• Il est tout à fait légitime de s’intéresser à son arbre généalogique surtout dans la mesure où cela permet de rendre certains droits liés à l’héritage, les liens de sang, le prix du sang, le mariage consanguin, etc.[16]
• Des individus comme Abû Lahab, l’oncle du Prophète (r) jouissent de la meilleure lignée arabe ; cela n’empêche pas au Coran de les condamner.[17]
• De nombreux convertis non arabes dépassent en mérite la plupart des Arabes musulmans comme ce fut le cas pour leurs voisins les Perses qui engendrèrent l’élite des savants musulmans avec à leur tête Salmân el Fârisî. Nous pouvons compter dès la deuxième époque dans le domaine du savoir, des personnages clefs descendants de l’empire sassanide comme el Hasan el Basrî, ibn Sirîn, ‘Ikrima ; etc.[18]
• l’Islam ne fait aucune discrimination raciale comme le souligne ibn Taïmiya en disant : « Si tu t’imprègnes de ce qu’était réellement la Tradition prophétique, tu te rendras compte que le Messager (r) n’a jamais fait de distinction entre un arabe et un non arabe (…) il n’a jamais privilégié les arabes dans la religion, ni en ce qui concerne le tribut, ni en ce qui concerne la captivité. Il ne les a jamais favorisés dans les traités de paix, il n’a jamais décrété qu’un non arabe n’était pas du même rang qu’un arabe au niveau du mariage, et il ne leur a jamais permis de jouir d’une chose indépendamment des autres. Il fondait cependant ses jugements sur les hommes en fonction des noms que le Coran leur donne comme : croyant/mécréant, vertueux/pervers. »[19]
• Le message de Mohammed (r) s’adresse à l’humanité entière. C’est pourquoi, il n’offre aucun statut particulier (dans l’ensemble) aux Arabes pourtant considérés par la majorité des savants comme le meilleur des peuples. L’Islam est la religion de la justice, principe par lequel sont maintenus les cieux et la terre. Cela ne consiste pas à mettre au même niveau des choses qui sont complètement différentes.[20] Les deux seuls statuts particuliers aux Arabes que l’on peut recenser concernent Quraïsh qui représente l’élite des tribus arabes et le clan des Banû Hâshim. Le Khalifat est en effet réservé à la descendance Quraïshite et les Banû Hâshim ne doivent pas recevoir l’Aumône (la Zakat) ; les seuls dons qu’ils peuvent recevoir proviennent uniquement du cinquième des butins de guerres.[21]
• Avec l’expansion des frontières musulmanes, la notion d’arabe a énormément évolué. Avant l’Islam, les tribus arabes[22] étaient confinées dans la péninsule arabique qui s’étend du golf persique à la mer Rouge d'est en ouest et de l’extrémité du Yémen au sud aux frontières du Shâm au nord. Par la suite, les frontières se sont étendues sur les anciennes terres byzantines, sassanides, berbères, etc. elles englobèrent les côtes du Moyen-Orient actuel et l’Arménie au nord et jusqu’aux extrémités de l’orient et de l’occident. Elles se divisèrent très vite en deux grands ensembles :
- des régions où la langue arabe –qui perdait de sa pureté au contact des autres civilisations – fut dominante à tel point que la plupart de ses habitants ne connaissaient quasiment pas d’autres langues (Iraq, Shâm, Égypte, Andalousie, etc. et probablement les régions perses et du Khurasân au début).
- Des régions où régnait la langue locale comme chez les Turcs (Turkménistan actuel), au Khurasân, en Arménie, et en Azerbaïdjan.
Ainsi, le monde musulman se divisa en trois catégories : il y avait les Arabes d’origine, les Arabes d’adoption, et les non arabes. Les Arabes d’origine se divisaient eux-mêmes en trois catégories : ceux qui ne délaissèrent ni leur langue ni leur terre natale (ou qui délaissèrent l’une des deux) ; des grandes lignées arabes qui délaissèrent leur langue et leur terre natale ; et des Arabes dont on ne connaît pas vraiment l’origine comme dans la plupart des cas aujourd’hui. Les arabophones se divisaient également en trois catégories : il y a avait ceux qui parlaient couramment l’arabe et sans accent, ceux qui parlaient couramment l’arabe avec un accent, car elle était pour eux une deuxième langue comme ce fut le cas pour la plupart des savants, et ceux qui ne parlaient pas l’arabe couramment. Ainsi, il suffit désormais de parler arabe ou/et d’être né dans un pays arabe pour prétendre être un arabe selon une certaine tendance[23].[24] La langue arabe, qui est la langue du Coran, est quoi qu’il en soit, capitale pour tous les musulmans.[25]
L’Islam, la religion universelle par excellence ne connaît ni frontière ni nationalité. Or, force est de constater qu’à notre époque, la lumière de la Révélation s’est estompée dans les cœurs de bon nombre de ses adeptes. Des réflexes de l’ère païenne refont surface. De nouveaux fléaux polluent les relations entre les musulmans. Les symptômes se manifestent à travers la xénophobie ou dans une moindre mesure le nationalisme. Sans entrer dans des détails géopolitiques, le nationalisme arabe dont le parti Baas est l’une des manifestations les plus significatives, fait rage. Arme de choix contre l’Empire ottoman en déclin, le mouvement vu le jour à la fin du 19ème siècle. Il fallait monter les Arabes contre les Turcs et diviser les rangs des musulmans. L’idée ainsi concoctée par les Occidentaux, fut emmenée dans les valises des évangélistes à une époque où la propagande battait son plein en terre syrienne. Par la suite, le mouvement prit du terrain en Iraq et au Liban ; pays que la Syrie rallia à sa cause. Le premier colloque fut tenu à Paris en 1910 de l’ère chrétienne.[26] Zaki Arsouzi (1898-1968) et Michel Aflaq (1910-1989) sont les leaders historiques du parti Baas. Il est l’œuvre de minorités (Aflaq est un descendant de la grande bourgeoisie chrétienne de Damas, Arsouzi était alaouite) qui ont toujours été en marge de la masse sunnite et qui n’avaient jamais accédé au pouvoir. En Irak, le parti Baas a recruté la majorité de ses adeptes parmi les Arabes chrétiens et les sunnites de la région de Takrit, au nord de Bagdad. En arabe, le terme Baas a deux sens : résurrection ou renaissance, selon le contexte. Le programme du Baas, établi lors de son premier congrès en 1947, fut de définir la nation arabe, du Taurus au Hedjaz, jusqu’au Maroc, et de faire son unité sur une base culturelle et linguistique, non confessionnelle, voire laïque, à la manière dont la Prusse avait fait l’unité allemande. À cet égard, la filiation fichtéenne est très nette : les fondateurs du Baas connaissaient les Discours à la nation allemande de Fichte. Ils firent le choix du socialisme ; pour Aflaq (le maître à penser de Saddam Hussain[27]) et Salah al-Din Bitar, « le socialisme représentait le moyen technique d’organiser la société arabe ».[28]
Bref, le parti Baas a ses limites, ses heures de gloire sont derrière lui. Comme le dit si bien ‘Omar ibn el Khattâb : « Nous étions le peuple le plus vil et Allah nous a donné la gloire avec l’Islam. Mais si nous cherchons la gloire avec autre chose que l’Islam, Il va nous ramener comme nous étions. »[29] Si l’Histoire donne des leçons, celles-ci furent particulièrement révélatrices en 2003.
Que les Prières et les Salutations d’Allah soient sur notre Prophète Mohammed ainsi que sur sa famille et tous ses Compagnons !
Traduit et adapté pour islamhouse par :
Karim ZENTICI
Relu par Abu Hamza Al-Germâny
source:islamhouse.com